Les recettes de l'Institut Montaigne pour l'éducation dans les quartiers pauvres

Dans son rapport "L'avenir se joue dans les quartiers pauvres", l'Institut Montaigne s'attarde largement sur la question des inégalités scolaires. Selon lui, l'"ascenceur social" ne redémarrera qu'à condition d'investir massivement et d'encourager de nouvelles approches : encadrement resserré en maternelle, affectation d'enseignants "efficaces" en QPV, secteurs multicollèges, etc.

"Osons faire table rase d’une conception égalitaire de l’éducation afin d’affirmer clairement que notre pays doit offrir plus et différemment à ceux qui ont le moins." Tel est le credo de l'Institut Montaigne en matière d'éducation selon un rapport intitulé "L'avenir se joue dans les quartiers pauvres", dont les thématiques vont bien au-delà de la seule éducation, publié début juin (sur les grandes lignes de ce rapport dans son ensemble, voir encadré au bas de notre article du 3 juin).

Pourquoi une position aussi iconoclaste, qui irritera les défenseurs d'une éducation égalitaire ? Parce que, selon ses auteurs, "l’ascenseur social est en panne et […] la méritocratie n’est qu’imparfaite dans les quartiers pauvres, tant l’origine socio-économique semble expliquer la performance scolaire des élèves". Pour l'Institut Montaigne, l’école doit en effet "permettre à chacun de maîtriser a minima les fondamentaux, pour que chaque élève réussisse sa scolarité et devienne pleinement citoyen".

Stimulation cognitive

En guise de moteur, le groupe de réflexion d'obédience libérale prône un investissement massif pour l'éducation dans les quartiers pauvres. Quatre "propositions-clés" sont formulées, qui, d'ailleurs, sont déjà à l'œuvre sous forme expérimentale. Il s'agit tout d'abord de "recruter sur profil tous les enseignants des classes dédoublées afin d’affecter devant les élèves les plus en difficulté les enseignants les plus efficaces". Ensuite de "déployer un éventail de dispositifs dont la puissance publique dispose pour attirer les enseignants les plus efficaces dans les classes dédoublées des REP+", le tout "en coordination avec les collectivités locales"… sans que le rôle de ces dernières ne soit détaillé plus avant. Autres propositions-clés : généraliser le dispositif "petit-déjeuner gratuit", déjà engagé dans 1.000 communes depuis la rentrée 2021, et, enfin, généraliser et pérenniser le dispositif "vacances apprenantes", mis en place après le confinement de 2020 et reconduit en 2021. Pour ces deux actions, l'appui des collectivités est également sollicité.

On note encore une proposition visant à expérimenter dans les QPV "des programmes de forte stimulation cognitive dès le plus jeune âge, grâce à un encadrement resserré en lien avec les familles". Sur la base d'un ratio d’un adulte pour quatre enfants âgés de trois ou quatre ans, l'Institut Montaigne évalue le coût du "rétablissement de l’équité scolaire pour les enfants scolarisés en REP+ à l’entrée au CP" à 315 millions d'euros par an.

Impliquer les familles

Autre angle d'attaque : l'implication des familles, replacées "au cœur du projet éducatif". Ici, il est notamment question, "par une action plus volontariste de l’État et/ou des collectivités", de fournir aux parents du matériel éducatif afin qu'ils puissent accompagner à la maison le travail de l’enseignant.

Le rapport consacre également un chapitre entier à l'orientation. Celle-ci doit être, selon l'Institut Montaigne, refondée en milieu scolaire tandis que le lien entre les entreprises et les quartiers doit être renforcé. On retiendra les propositions visant à "multiplier les secteurs multicollèges en favorisant la méthode de la montée alternée [sur une année donnée, tous les élèves sont affectés dès la 6e à l'un des collèges du secteur, où ils y restent jusqu'en 3e ; l'année suivante, tous les élèves relèvent d'un autre établissement du secteur, ndlr], avec un périmètre de distribution dépassant les QPV", et, enfin, à "fermer les collèges où les indicateurs de ségrégation sont les plus élevés".