Pour protéger la planète, le geste réflexe est de planter des arbres. Mais il y a un autre écosystème vital qui se meurt trois fois plus vite et dans l’indifférence : les zones humides. Peu connues du public, elles désignent aussi bien les marais, rivières, lacs, tourbières que les mangroves ou les récifs coralliens. À l'approche du Congrès mondial de la Nature qui se tiendra en juin à Marseille, la France souhaite mobiliser tous les acteurs concernés.

À l’échelle mondiale, 35 % des zones humides ont disparu entre 1970 et 2015, un rythme trois fois supérieur à celui des forêts, selon le panorama dressé en 2018 (1) par la Convention Ramsar sur les zones humides. Les menaces sont nombreuses : agriculture intensive, usage croissant d’engrais, urbanisation, extraction minière, changement climatique, espèces envahissantes et pollution. Plus de 80 % des eaux usées sont ainsi déversées dans les zones humides sans traitement adéquat.
Pourtant, les zones humides que constituent les marais, rivières, lacs, tourbières, mangroves et récifs coralliens, jouent un rôle fondamental pour la vie sur Terre. Elles fournissent, directement ou indirectement, presque toute l’eau douce consommée dans le monde et sont une source d’aliments pour plus d’un milliard de personnes. Elles sont aussi une source de matières premières, de ressources génétiques pour la pharmacopée et d’énergie hydroélectrique. Elles nous protègent des catastrophes et elles stockent plus de carbone que tout autre écosystème terrestre.
Une valeur cinq fois plus élevée que celle des forêts tropicales
Des études montrent que la valeur économique des services fournis par les zones humides dépasse largement celle des écosystèmes terrestres et est cinq fois plus élevée que celle des forêts tropicales. Selon une estimation réalisée en 2011 par le Commissariat général au développement durable (CGDD), leur valeur s’établit dans une fourchette comprise entre 2 400 et 4 400 euros par hectare.
Pour promouvoir leur conservation et leur utilisation rationnelle, la Convention Ramsar a été adoptée dans les années 70 par 170 pays. Ils se sont engagés à préserver plus de 2 300 zones humides, représentant 250 millions d’hectares, soit 13 à 18 % des zones humides de la planète. En France, 50 sites ont été labellisés "Ramsar". Les vallées de la Scarpe et de l’Escaut, dans les Hauts-de-France, sont les dernières à avoir intégrer le réseau international début février. Parmi les autres sites, il y a les Baies de Somme et du Mont Saint-Michel, le Golfe du Morbihan ou encore les Marais du Cotentin.
Un rapport parlementaire (2), remis au gouvernement en janvier 2019, préconise de doubler le nombre de zones humides d’importance internationale en dix ans et de restaurer 100 000 hectares de tourbières. Il propose aussi d’appliquer aux zones humides les dispositifs de compensation carbone et de "paiements pour services environnementaux" qui rémunèrent les actions de protection de la biodiversité. La fiscalité peut aussi jouer en rôle. Dans ce cadre, le gouvernement vient de supprimer la taxe additionnelle qui s’appliquait sur les tourbières.
Air Liquide, L’Oréal et Danone en tête
Les entreprises sont elles aussi mobilisées au sein de la coalition "Entreprises engagées pour la nature-Act4 Nature" car la perte des zones humides peut impacter leur business model – le rapport de l’IPBES montre que 40% de l’économie mondiale dépend de la biodiversité. Alors que l’année 2020 est cruciale avec la tenue du Congrès mondial pour la nature de l’UICN à Marseille et la COP15 en Chine, 38 entreprises de toutes tailles et de tous secteurs tels que CDC, Suez, Carrefour, Séché environnement ou Utopies s’engagent à respecter les principes communs de respect de la biodiversité. Un bilan de leur action sera fait tous les deux ans.
Dans le dernier classement du CDP sur les forêts et la protection des ressources en eau, trois entreprises françaises rejoignent la prestigieuse "liste A" pour l’exhaustivité des informations publiées, la gestion des risques environnementaux et la mise en œuvre des meilleures pratiques. Il s’agit d’Air Liquide, L’Oréal et Danone. Ce-dernier a fait de la protection des cycles de l’eau une priorité il y a plus de deux décennies en s’associant à la convention de Ramsar. Le groupe est numéro deux mondial des eaux en bouteille (en volume), un marché qui représente 18 % de ses ventes.  
Concepcion Alvarez, @conce1 
(1) Lire le rapport sur l’état mondial des zones humides de la Convention Ramsar 
(2) Lire le rapport parlementaire "Terres d’eau, terres d’avenir"

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