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La vulnérabilité alimentaire des départements passée au crible

Quel est le degré de vulnérabilité ou au contraire de résilience de chaque département sur le plan alimentaire ? C'est le travail original qu'a mené le Conseil national pour la résilience alimentaire (CNRA) dans son premier "baromètre de la résilience alimentaire". Publié le 8 avril 2021 à l’occasion de la première journée parlementaire de la résilience alimentaire, il classe les territoires à partir de trois thèmes principaux : la production alimentaire, le respect des écosystèmes et l’accès à l’alimentation locale.

Le premier baromètre de la résilience alimentaire a été publié le 8 avril 2021 par le Conseil national pour la résilience alimentaire (CNRA), une association qui réunit élus, citoyens, entreprises et agriculteurs autour de la promotion des circuits locaux. Son objectif : compiler les indicateurs disponibles sur le sujet, issus des données de l’Agreste (site statistique du ministère de l’Agriculture), de l’Insee ou encore de l’Institut national de la recherche agronomique (Inrae), pour "comprendre les points forts et les vulnérabilités" de chaque territoire, "partager les bonnes pratiques" et inciter les acteurs, professionnels et collectivités territoriales, à passer à l’action. Des enjeux importants qui sont revenus sur le devant de la scène avec la crise de Covid-19. La souveraineté alimentaire fera d'ailleurs partie des objectifs assignés à la future PAC.

Le baromètre se fonde sur trois thématiques principales, considérées comme clés pour la résilience alimentaire. Premièrement : la production alimentaire. Il s’agit là d’évaluer la capacité d’un territoire à subvenir aux besoins de sa population. La production alimentaire de chaque famille d’aliments est ainsi mise en regard des besoins nutritionnels des habitants du territoire. A noter : les flux logistiques et les dynamiques d’importation ne sont pas pris en compte. A travers ce premier critère, on peut déjà discerner des départements comme la Lozère, le Tarn ou le Lot qui ont une production permettant de couvrir les besoins de leur population. A l'inverse, la Corse, le Var, les Bouches-du-Rhône ou le Gard ne disposent pas d’une production suffisante.

La Meuse, premier département pour la surface agricole utile par habitant

Le CNRA se penche aussi sur l’évolution de la population agricole. Au niveau national, en trente ans, la part de l’emploi agricole a chuté de plus de 7% à moins de 1,5% en 2019. Et cette population est vieillissante ; elle est à moitié composée de personnes âgées de plus de 50 ans. Le baromètre donne une carte précise de l’évolution de cette population par département, permettant d’identifier les départements "à risque", comme les Alpes-Maritimes ou le département du Nord notamment, et ceux où la dynamique est positive, comme les départements de la Marne, de l’Aube et de la Nièvre en particulier.

Deuxième thématique prise en compte : le respect des écosystèmes. Le baromètre compare ainsi la surface agricole utile par habitant par rapport à la surface totale du département. Sur cette carte, un seul département, la Meuse, dispose d’une surface suffisante et a atteint l’objectif de zéro artificialisation nette entre 2011 et 2016. Dans d’autres cas plus à risque, comme les départements  du Rhône, de l’Aisne ou encore de la Corrèze, la surface agricole utile par habitant est trop faible, et cet objectif de zéro artificialisation nette n’a pas été atteint. Le baromètre met aussi en avant la part de surface agricole biologique, avec des départements de l’Ain et des Alpes-de-Haute-Provence plutôt bien lotis, tout comme d’autres départements au sud (Vaucluse, Gard, Bouches-du-Rhône…).

"Que chacun s’en saisisse et passe à l’action"

Enfin, la troisième thématique abordée par le baromètre est celle de l’accès à une alimentation locale : la présence de réseaux de distribution en circuit de proximité, l’indicateur choisi étant le nombre de points de vente par rapport au nombre d’habitants par département (la Lozère est dans cette carte le département le mieux placé) et la présence d’équipements de transformation (moulins à céréales, légumeries, conserveries, ateliers collectifs de découpe, abattoirs…), en se basant sur le nombre d’équipements par rapport au nombre d’exploitations. Des données pour lesquelles seuls les départements franciliens semblent être équipés de façon optimale avec au moins 4 équipements pour 1.000 exploitations.
Le baromètre ne dresse pas un classement des territoires les plus résilients sur le plan alimentaire car l’idée est "que chacun s’en saisisse et passe à l’action", a précisé Guillaume Fourdinier, vice-président du CNRA, lors de la première journée parlementaire sur la résilience alimentaire organisée le 8 avril. Le baromètre est aussi destiné à mettre en valeur des pratiques efficaces à reproduire. Exemple avec l’initiative engagée par les Hautes-Alpes et la marque "Hautes-Alpes naturellement". Cette marque, portée par la chambre d’agriculture, valorise les produits issus du territoire, garantissant l'origine des produits, qu'ils soient bruts ou transformés, et permettant de les identifier. Nombre de collectivités sont aujourd'hui engagées dans un projet alimentaire territorial (PAT). Le dispositif bénéficie d'un coup de pouce important dans le cadre du plan de relance, avec l'objectif d'un PAT par département.

"Le temps de l’expérimentation est derrière nous, nous travaillons maintenant pour atteindre l’objectif de 50% de la consommation alimentaire produite localement", souligne le CNRA.