Comment les tiers-lieux permettent de redynamiser les zones péri-urbaines

vue par drone de la Cité Fertile - crédit photo @ Adrien Roux
16 Sep 2021 | Lecture 4 min

Ils facilitent le télétravail, la formation ; apportent des services culturels et sociaux sur les territoires ; permettent de réhabiliter des friches ou des bureaux abandonnés ; ils apportent de l’inclusion et du lien social : les tiers-lieux se développent en France et sont une chance pour les zones périurbaines et les quartiers prioritaires.

Pour l’association France Tiers-Lieux, le tiers-lieu est une démarche collective d’intérêt général, qui s’inscrit dans la coopération territoriale dès sa conception. Autrement dit, le tiers-lieu à vocation à soutenir le territoire dans lequel il s’implante dans le but de servir l’intérêt général localement, c’est-à-dire “créer de nouvelles dynamiques économiques ou sociales en réponse aux enjeux des territoires”. C’est ce qui donne aux tiers-lieux la multiplicité de formes qu’on leur connaît, puisqu’ils s’organisent généralement autour d’activités économiques (espaces de coworking, incubateurs), autour de l’innovation technologique et sociale (Fab Lab, laboratoires citoyens, living labs), d’activités culturelles et associatives et, enfin, d’activités de service public (conciergeries, bibliothèques, etc.).

Il existe environ 2 000 tiers-lieux aujourd’hui en France, et de nombreux lieux continuent d’ouvrir, à l’image, récemment, de la Cité des Halles, un tiers-lieux créé en plein cœur de la métropole Lyonnaise sur une friche appartenant à Bouygues Immobilier. En France, les tiers-lieux sont majoritairement répartis dans les 22 métropoles françaises, mais aussi dans des territoires ruraux où ils viennent répondre à l’enclavement et l’isolement de nos villages. C’est par exemple ce que propose le Groupe SOS avec l’opération 1 000 cafés, qui vise à revitaliser des petites communes en ouvrant ou reprenant mille lieux de convivialité parmi les communes de moins de 3 500 habitant-es. La plupart du temps, le tiers-lieu rural se définit d’ailleurs comme un espace de convivialité mais aussi un espace multiservice qui vient répondre à la perte de services publics dans nos villages. Ces endroits deviennent ainsi incontournables et gèrent, par exemple, de dépôt de pain, d’épicerie, de relais poste, de point presse ou encore de points d’accès au numérique où à la programmation culturelle locale.

Un constat partagé par l’entreprise Comptoirs de campagne, qui développe un modèle de commerce multiservices physiques et connectés pour ramener des services de proximité (épicerie locale, bistrot, poste, pressing, cordonnerie…) au cœur des villages de plus de 800 habitants. Elle a, pour le moment, installé 10 de ses conciergeries sur le territoire. Pierre Cohin, Responsable Marketing de la structure précise d’ailleurs qu’il s’agit essentiellement “de villages péri-urbains situés à une quinzaine de kilomètres des villes moyennes de 15 000 habitants. Des espaces, plus que les territoires très isolés, qui ont le plus souffert de la fuite des commerces”.

Et, de fait, les tiers-lieux représentent en effet une formidable opportunité pour l’attractivité des zones péri-urbaines et des villes de banlieues. Ils apportent aux territoires une manne intéressante pour l’emploi local, pour la transition écologique et le développement de lien social.

La Cité Fertile, un tiers-lieux éco-responsable à Pantin, en Ile-de-France - crédit photo @ Adrien Roux

La Cité Fertile, un tiers-lieux éco-responsable à Pantin, en Ile-de-France – crédit photo @ Adrien Roux

300 tiers-lieux vont ouvrir bientôt dans les quartiers prioritaires

D’ailleurs, l’État ne s’y trompe pas. Via le plan “nouveaux lieux, nouveaux liens” lancé en 2019, il va soutenir la création de 300 tiers-lieux avec l’objectif d’en implanter davantage dans les quartiers prioritaires. L’ANRU (Agence Nationale de Rénovation Urbaine) a même créé un fonds d’investissement pour soutenir ces projets dans les quartiers, puisqu’ils sont des facilitateurs de lien social, d’inclusion, et de partage. L’ANRU travaille aussi à la création d’une centaine de fermes urbaines dans les quartiers prioritaires afin d’assurer que le développement des “villes vertes” ne se fasse pas au détriment des quartiers et banlieues.

Un point important puisque ces lieux sont aussi une chance pour accélérer la transition écologique des territoires et permettre la transmission de bonnes pratiques aux habitants en termes d’alimentation locale, de pratiques zéro-déchet, de réemploi, réparation, ou de mutualisation de ressources. D’ailleurs, selon l’un des pionniers du mouvement tiers-lieux en France, Stéphane Vatinel, ”les projets de tiers-lieux sont très orientés social et environnemental avec une forte intégration de la notion de commun. Il y a de plus en plus de lieux qui émergent avec la volonté de penser ensemble les besoins personnels des uns et des autres”. Pour lui qui vient de lancer avec Sinny&Ooko, un incubateur pour faire émerger des tiers-lieux sur le territoire, c’est là l’un des grands avantages de ces lieux alternatifs.

Ils sont aussi une chance pour les territoires puisque ces lieux permettent de réhabiliter des friches industrielles ou commerciales, en particulier dans les quartiers périphériques des centre-villes. C’est le cas, par exemple, de la Cité Fertile, un tiers-lieu écoresponsable installé à Pantin, dans une ancienne gare de marchandises SNCF ou encore de l’Oasis 21, un tiers-lieux qui a emménagé dans des bureaux laissés à l’abandon à la Villette.

Enfin, ils apportent un nouveau dynamisme économique puisqu’une grande partie des ces lieux alternatifs sont imprégnés de la notion de travail et de collaboration via des espaces de coworking, des living lab ou des fablab, mais aussi parce qu’ils permettent souvent de donner un point d’accès au numérique et à la technologie à des populations qui en sont privées. Ce sont aussi des endroits propices à la transmission de savoir et de compétences. Il sont également des endroits où il est possible d’entrevoir une relocalisation des savoirs et de certaines productions. Pour l’emploi local et la préservation des compétences sur un territoire, ce sont donc des endroits clés.

D’autant plus que, démographiquement parlant, les métropoles subissent un exode des jeunes couples avec enfants qui migrent vers leurs communes périphériques. Or, avec une concentration du travail dans les cœurs de ville, cela entraîne aussi des déplacements pendulaires qui ont pour conséquence la congestion du trafic et la pollution. Le tiers-lieux est alors une possibilité, pour les zones périurbaines, de conserver leurs actifs sur le territoire via la mise en œuvre du télétravail. La numérisation de l’économie permet ainsi de rééquilibrer les déplacements et de redonner une certaine vitalité aux communes périphériques. Ce n’est pas un hasard, d’ailleurs, si 76% des tiers-lieux français ont une dominante “co-working” dans leurs missions.

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