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Environ 30% des emplois industriels situés dans les communes rurales

Sur la base de la nouvelle définition du rural par l'Insee, la Datar de la Nouvelle-Aquitaine a cherché à établir le poids de l'industrie dans le monde rural. Hors agriculture, l'industrie y est près de deux fois plus présente que l'ensemble des autres secteurs.

Souvent assimilé à l'agriculture, le monde rural n'en est pas moins industriel. C'est la démonstration à laquelle s'est livrée la délégation à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale de la Nouvelle-Aquitaine dans une note récente intitulée "L'industrie en milieu rural, en France et en Nouvelle-Aquitaine". En s'appuyant sur la nouvelle définition du rural de l'Insee (sont considérées comme rurales les communes peu denses ou très peu denses), les auteurs, dont Olivier Bouba-Olga, professeur de sciences économiques de l'université de Poitiers, analysent ainsi la géographie de l'activité économique avec un focus sur l'industrie et sur la région Nouvelle-Aquitaine.
Premier point, sans surprise, la ruralité concentre une majorité écrasante de l'emploi agricole (81%), mais l'industrie n'est pas en reste. Près de 30% de l'emploi industriel se situe dans le rural. L'industrie est même "1,7 fois plus présente dans le milieu rural que l'ensemble de l'activité privée hors agriculture", signale la note. Dans le détail, 17% des salariés du secteur privé hors agriculture, soit 18,4 millions de personnes, sont employés dans des communes rurales, et 29,8% de l'emploi salarié privé du secteur industriel, soit 2,9 millions de salariés, se situe dans des communes rurales. La localisation géographique des ressources mobilisées par les entreprises et les besoins en termes de foncier, moins onéreux en milieu rural qu'en milieu urbain, expliquent en partie ces données.

Un poids qui varie en fonction des secteurs industriels

Mais "le poids du rural dans les effectifs de l'industrie varie cependant fortement en fonction des secteurs d'activités industrielles" et aussi en fonction des régions, détaille aussi le document. Plusieurs secteurs industriels se détachent. 67% des emplois liés aux "autres activités extractives" sont ainsi situés dans le rural en 2019 (12.022 personnes). Viennent ensuite le travail du bois et de la fabrication d'articles en bois et en liège, à l'exception des meubles et articles en vannerie ou de sparterie (61,2%, 29.741 personnes), l'industrie du cuir et de la chaussure (53%), la fabrication de meubles (49%) et la fabrication de produits à base de tabac (44,5%). D'autres secteurs industriels sont à l'inverse bien moins présents en milieu rural qu'en milieu urbain : la fabrication d'autres matériels de transport (9,3% seulement, 15.434 personnes), du captage, traitement et distribution d'eau (10,9%, 3.450 personnes) ou de l'industrie pharmaceutique (14%).

Un poids rural en Nouvelle-Aquitaine 1,4 fois plus important sur l'industrie

L'étude se focalise ensuite sur le cas de la Nouvelle-Aquitaine, qui fait partie, avec la Bretagne et la Bourgogne-Franche-Comté, des régions les plus rurales de France pour sa population (51%) et son emploi total (36%). Dans cette région, le poids du rural est entre 1,6 et 1,7 fois plus important que la moyenne sur l'ensemble de l'activité privée hors agriculture : 28% des salariés du privé hors agriculture (soit 1,4 million de personnes) sont situés en milieu rural dans la région et autour de 1,4 fois plus sur le segment industriel (en nombre d'effectifs ou d'établissements). Les trois secteurs industriels les plus représentés en milieu rural par rapport à la moyenne française sont le captage, traitement et distribution d'eau (2.417 personnes, soit un poids en milieu rural plus de deux fois plus important qu'en moyenne en France), l'industrie chimique (9.486 personnes) et la collecte et traitement des eaux usées (1.561 personnes).

"Le poids du rural dans la population, l'emploi total, l'emploi privé et l'industrie est conséquent"

Quatre secteurs font toutefois exception, indique la note : l'industrie pharmaceutique dont la part des effectifs localisés dans les communes rurales en Nouvelle-Aquitaine n'est que de 6,1% contre 14% en France métropolitaine, la fabrication d'autres matériels de transport (6,8% contre 9,3%), la fabrication de produits informatiques, optiques et électroniques (14,5% contre 16,5%) et la fabrication d'équipements électriques (19,6% contre 20,6%).

"En mobilisant la nouvelle définition du rural, l'exploitation des données disponibles montre que son poids dans la population, l'emploi total, l'emploi privé et l'industrie est conséquent", conclut la note, insistant sur la Nouvelle-Aquitaine, qui "apparaît dans tous les cas comme une région où le poids du rural est plus important qu'en moyenne France entière".

Les auteurs proposent de poursuivre le travail en construisant un outil de cartographie dynamique pour visualiser la géographie des secteurs industriels à une échelle territoriale fine (EPCI ou Territoires d'industrie) et d'apporter des éléments d'explication à cette surreprésentation de certains secteurs industriels en région dans les effectifs et dans le monde rural.

  • Un enjeu de formation

Le poids de l’industrie dans la ruralité pose le problème de l'accès à la formation, tel que l’ont montré les assises de l’Association des petites villes de France (APVF) qui se sont tenues à Cenon (Gironde), le 10 septembre, où il a été beaucoup dit que 70% des emplois industriels français se situaient dans des villes de moins de 20.000 habitants (voir notre article du 13 septembre 2021). Le problème a encore été soulevé par la ministre déléguée à l'Industrie Agnès Pannier-Runacher, lundi 13 septembre, lors d'une visite à l'usine de fabrication de rails Saarstahl à Hayange (Moselle). Elle a souligné "la difficulté est de trouver les bons profils et d'attirer des jeunes et des personnes en reconversion". Quelque 70.000 postes sont à pourvoir dans l’industrie, "mais nous n'arrivons pas à recruter", a-t-elle regretté. Une thématique sur laquelle la Banque des Territoires est mobilisée. Elle propose, via son outil de cartographie dynamique sur les territoires d'industrie, de visualiser les secteurs industriels et principaux métiers en tension afin d’accompagner l’ouverture de nouveaux centres de formation.